Titre : série Passe Temps
Technique : trikhotage : cheveux et épingles en acier
Date : 1997

Josiane Guitard-Leroux
17 villa Henriette
92160 ANTONY
01.46.74.64.07.

Temps du tressage, Tressage du temps.

Entre passé et futur, ces quelques tiges capillaires jouent avec le temps, et se font réseaux, résilles ou réticules. Ce matériau organique, si lié à la séduction et chargé de symbolique, lorsque il compose une chevelure, change radicalement de statut lors de sa chute naturelle. Détaché de ce corps qu’il a accompagné , devenu déchet, rebut, tas informe, il est évacué.

Relevé de cette chute qui résume et condense notre présence dans le temps, il reprend sens grâce au faire artistique. Entrelacé, lié, tramé, signe et ponctuation de la mémoire, il informe ces maillages qui se révèlent comme des espaces de rencontre entre soi et soi.

Parmi les choix qui forment la trame de notre existence, celui qui a consisté à modifier le processus habituel de la perte des cheveux, fit bifurquer ma pratique du tressage. Récoltés chaque jour par l’artiste, lors de leur chute naturelle, les cheveux sont déposés dans diverses boîtes, dans l’attente d’être utilisés. Les qualités propres à ce matériau, malléabilité, résistance, plasticité, l’ont rendu propice à des mise en formes qui dérivent de cette technique. Témoin de l’éphémère et de la pérennité, vestige, le cheveu porte en lui l’empreinte du vécu du corps auquel il était relié. Il convoque à ce titre sa présence.

Nœuds de focalisation de l’insaisissable du présent, ces fragiles espaces parlent du temps. Aux mailles de ces filets, s’accrochent des instants du passé, et les promesses du futur. Lieux d’errance et de déambulation où se tresse du sens, ces entrelacs de presque rien s’offrent au regard comme des tissus du destin.

Josiane Guitard-Leroux


L'art de rien et presque tout ....

Ce sont des presque rien, qui s'entrelacent, se lient, ou se trament en de fragiles réseaux, dans un jeu troublant avec le vide. Signes et ponctuations de mémoires oblitérées, ces maillages révèlent presque tout. Le matériau organique s'informe , et informe ces tressages subtils . L'enchevêtrement de cheveux prend sens.

Celle qui les tisse est fille d'Arachné, plus modeste cependant, ne rivalisant pas avec les Dieux mais juste avec elle même. Soeur de Pénélope, elle en a la ruse, jouant avec le Temps pour lier les accrocs du passé et les promesses du futur. Patiente aussi, elle a su attendre le moment propice, celui où elle a eu la certitude qu'elle pouvait donner à voir ces lieux de mémoire pour qu''ils deviennent espaces de rencontre.

Il suffira de presque rien, de trois fois rien , pour que se croisent nos chemins; ceux des regardeurs et celui de la faiseuse.

Trois, chiffre symbole. Trois, les lettres qui détermineront ce possible. Trois, aussi les mots qui la définissent.

Femme, née à Paris en 1954.

Plasticienne, dont la pratique se fonde sur le tressage, après avoir parcouru les chemins du collage, de l'assemblage et du "bricolage".

Universitaire, diplômée de Paris 1, titulaire d'une maîtrise de philosophie et agrégée d'arts plastiques.


Titre : série Passe Temps
Technique : trikhotage
Date : 1997
Emmanuel Brouillard est écrivain, il collabore à l’émission "les Papous dans la Tête" sur France-Culture. Il est rédacteur du Petit Brouillard Illustré.

Emmanuel Brouillard

en "Résonance littéraire" avec

Josiane Guitard-Leroux.

Texte écrit pour le Salon de la Jeune peinture 1997.

Le cheveu n’est pas la partie la plus éphémère de nous-même et ce n’est pas les archéologues égyptiens surgissant des sépultures quadri-millénaires, une mèche de momie à la main, hilares, qui nous contrediront. Le cheveu pousse, tombe, et pousse dans la tombe le crâne, les nerfs, la vie qui l’ont fait naître. Le cheveu demeure là où tout le reste meurt.

Au matin, il arrive qu’on ne se regarde plus dans son miroir, mais dans le lavabo, où tel réseau capillaire semble nous mettre en demeure de l’appréhender. Nous voici captés par cet entrelacs de lignes. Une mise en forme soudain semble s’imposer, surtout si on ne l’est pas (en forme). Mais l’entropie nous gagne, et nous perd. Et la vie nous entraîne, et nos projets s’effondrent.

Sauf quand on s’appelle Josiane Guitard-Leroux.

Il y a de l’être dans le cheveu, de l’ontologie dans le henné. Le roux des cheveux de josiane Guitard- Leroux n’est pas étranger à cette substance; d’ailleurs, rien de ce qui est capillaire ne lui est étranger. Quand elle lira ces lignes , peut-être que ses cheveux se tresseront sur sa tête, pourtant je crois pouvoir affirmer ceci: il s’en est fallu d’un cheveux pour qu’elle utilise un autre moyen d’expression. Chez elle l’alopécie fut salvatrice. Et c’est à elle que nous devons ces réseaux, ces mailles, ces drôles de trames...

Avec l’œuvre de Josiane Guitard-Leroux c’est un peu d’hair qui entre dans le monde confiné du minimal art.

Grâce aux productions de cette artiste, qui perdureront alors que tout vestige de notre civilisation sera tombé en poussière, les archéologues du futur sauront qu’au vingtième siècle déjà, l’homme était un réseau, le plus faible des réseaux peut-être, mais un réseau pensant.


1998

Salon de la jeune Peinture, du 17 au 27 avril , à Paris.

Exposition" Baignade Interdite", du 28 Juin au 30 août, à Seyssel.

1997

Trikhotage : Assemblage par chainette des cheveux tombés et récoltés chaque jour. (quatre-vingt-dix-neuf, puis trente trois jours consécutifs.)

Production de réseaux de plus grand format, maintenus au mur directement par des épingles, ou fixés sur de la tarlatane.

Participation au Salon de la Jeune Peinture, du 18 au 28 avril, à Paris.

Participation à l’exposition "Baignade Interdite" organisée par Les Ateliers de la Poudrière, à Seyssel, du 21 juin au 31 août.

Participation à l’exposition "Les curiosités", du 21 au 25 septembre à l’Espace Paul Ricard, à Paris.

1996

Tressage de cheveux: Chiasme entre une pratique et un matériau organique. Les cheveux de l’artiste sont récupérés chaque jour, lors de leur chute naturelle. Ils sont travaillés un par un pour former des réseaux, maillages, tressages, fixés sur un support en papier calque, puis présentés entre deux plaques de verre . Réalisation d’une série de vingt-sept pièces.

D.E.A. d’arts plastiques à Paris 1, avec Messieurs Jean Lancri, Jacques Cohen et Gilbert Lascault.

1995

Avènement du tressage. Focalisant le " Défaire-faire-refaire", il se relie autant à Pénélope, et à l’usage qu’elle fit, dans son ouvrage, de la marge d’adaptabilité et de la discontinuité pour différer le temps, qu’à Dibutade et sa volonté de fixer l’ombre fugitive en la répétant dans le geste fondateur de la peinture occidentale.

Le geste répétitif du tressage met en tension des espaces hétérogènes en créant une surface épidermée. Différents temps s’y entrelacent: celui de la conception, celui de la production, celui de la réception.

Agrégée d’arts plastiques.

1993

Licence d’arts plastiques.

1992

Maîtrise de philosophie sous la direction de Monsieur Gilbert Lascault, ayant pour titre:"La figure de la femme dans l’art contemporain français 1980-1990."

Pratique de l’encrage et de l’assemblage.

Une importance du faire, du geste, dans un acte liant temps et espace A partir de relevés d’empreintes à l’encre typographique, extraction de fragments réunis par collage, ou présentés assemblés.

Jeu sur l’ambiguïté des empreintes, ( exemple: des "formes végétales" sont obtenues sur des supports non végétaux.) Recherche sur la qualité du double dans une pratique de duplication et de répétition.


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