Daniel Leduc - écrivain


Daniel LEDUC

Ecrivain

Contact : daniel.Leduc3@wanadoo.fr
BIOGRAPHIE :

Né à Paris en 1950.
Etudes supérieures de cinématographie.
Publications d'une quarantaine de nouvelles dans divers magazines et journaux français ou étrangers.
Collaborations à de nombreuses revues de poésie.
Poèmes parus dans une trentaine d'anthologies françaises ou étrangères.
A exercé des activités de critique ou chroniqueur littéraire, artistique, musical ou cinématographique.
A dirigé des ateliers d'écriture en collèges et lycées.
Participations à des spectacles, expositions, manifestations culturelles.
Lectures.
Présentations d'auteurs.
Textes traduits dans plusieurs langues et publiés dans une quinzaine de pays étrangers.
Collabore actuellement en tant que critique littéraire au site internet http://www.axelibre.org


BIBLIOGRAPHIE :

LA RESPIRATION DU MONDE.Editions Arcam. 1988. Prix du Syndicat des Journalistes et Ecrivains.
AU FIL TRAME DES JOURS. Editions La Vague à L'Âme. 1991.
L'HOMME SECULAIRE. Editions L'Harmattan. 1993. Couverture de Noric. Prix René Lyr, décerné par l'Association des Ecrivains Belges.
LE CHANT DU VERBE suivi de DERRIERE LA PORTE DU SILENCE. Editions L'Harmattan. 1995. Couverture de Robert Patier. Préface de Serge Brindeau.
TERRITOIRE DU POEME. Editions La Bartavelle. 1996. Préface de Werner Lambersy.
ENSEIGNEMENT DE L'AUBE. Editions Editinter. 1997. Avec sept dessins originaux de RV Miloux. Préface de Jean Rousselot.
LE LIVRE DES NOMADES. Verlag Im Wald (Allemagne) . 1997. Edition bilingue français-allemand. Traduction de Rüdiger Fischer. Dessins originaux de Bertrand Sylvestre. Préface de Jean-Claude Villain.
LE LIVRE DES TEMPÊTES. Editions L'Harmattan. 1997. Couverture de Patricia Bruneaux.
DE L'AUBE. Editions Empreintes. 1997. Ouvrage d'art à tirage limité. Avec huit eaux-fortes en couleurs de Bernadette Planchenault.
UNE SOURCE PUIS UNE AUTRE. Editions L'Harmattan. 1999.
UN ROSSIGNOL SUR LE BALCON. Editions Le Dé Bleu. 1999. Collection “le farfadet bleu” (poèmes pour la jeunesse). Illustrations de Patrice Mazoué.
SILENCE DES PIERRES. Editions La Bartavelle. 2000.
LE LIVRE DE L'ENSOLEILLEMENT. Editions Manuscrit.com. 2001.
PARTAGE DE LA LUMIERE. Editions de l'Etoile du Nord (Canada) . 2002.
LA RESPIRATION DES JOURS. Editions L'Harmattan. 2002.


TEXTE :

Le livre qui se délivre

Ouvrir un livre est un acte de respiration volontaire ; comme ouvrir une fenêtre sur le monde – sentir le souffle de chaque chose sur sa peau intérieure.

Les mots palpitent ; ils résonnent et palpitent dans notre chambre d'échos. Les mots rebondissent : ils vont ainsi de la page au regard tourné vers lui-même, et du regard à la page griffée de sens, et de la page au regard, et de la page à la page… ils vont ainsi.

Ecouter les mots sourdre des profondeurs du livre, s'élever jusqu'au front qui s'interroge. La vie s'harmonise dans les boucles des lettres, prend forme entre les lignes, se soustrait dans les marges, échappe et se retrouve. La vie danse dans l'émo-tion. La vie dense.

Dans l'hémo-globine. Des maux.

Ouvrir un livre…

sur le monde…

Lecture . Qui nous permet de vivre à l'intérieur de la force des choses, dans l'articulation de chaque vertèbre de chaque vie. Lecture, mon alliée, ma source, mon arbre, je t'investis, je te ducasse, je te socrate ; je te mot-à-motive, je t'enfourche, je t'excentrique ; je te fouille, t'interroge, te verbalise. Lecture, ma compagne étoilée – enfante la Création du Monde. Sois l'inconnue qui se cherche, l'équation qui s'équilibre. Le point de non-retour du point. La ligne qui se courbe à l'infini. Sois ce que je suis quand je suis autre, ce que je serai quand je ne serai plus. Sois la vague qui crée et recouvre la vague. Le précipice où s'engouffrent les rives, et les mo(n)ts. Les soleils. Lecture, ample lecture, sois la vie.

Le livre s'approche des mains du lecteur, s'approche de son regard, s'ouvre, s'offre, se laisse conquérir. Il écarte ses pages mouillées d'encre sèche, de désir de renaître dans un cerveau bandant.

La direction du regard crée le sens, de même que le sens crée la direction. De même que le sens crée le sens.

Qui écrit quoi ? L'auteur trace ; le lecteur emprunte et recompose – le lecteur dénude ce qui est dénudé.

Qui lit et relie quoi ? L'auteur découvre de l'aube au crépuscule ce que détient la nuit, du crépuscule à l'aube ce que le jour décrète, de l'aube à l'aube ce que n'est pas le monde, de l'endroit à l'envers ce qu'il ne sera pas. L'auteur relie le monde. Et le lecteur sillonne, creuse les tranchées du verbe ; entretient l'inassouvissement des formes, l'hydratation du temps perdu ou retrouvé. Et le lecteur sillonne…

Tourner la page, avancer dans la vie. Ecrire ou lire ce que le lieu dit lorsqu'il devient mouvement, lorsque la marche élève et porte vers la clarté, vers cet autre soi-même sculpté dans le soleil. Et connaître les ombres qui tapissent nos nuits. Connaître le chemin, l'herbe, le pas tranquille. Le pas qui rejoint l'autre pas. Et l'autre pas qui parle…

Tourner la page. Ne pas écrire sur du déjà écrit (*). Ne pas rendre illisible, ne pas obscurcir sa pensée. Ne pas noircir ce qui peut être éclairé, ce qui sort de l'ombre, de la voûte du cœur.

Le lecteur sillonne. S'appuie sur des mots trop élastiques pour éclater ; qui s'étirent sans se tendre ; qui se déforment sans déformer, sans paraître ce qu'ils ne sont sous l'apparence du sens. Le lecteur claudique, avec ce qu'il faut d'errance pour se trouver. Et le chemin parcourt. Et le chemin parcourt…

Ecrire c'est crier, c'est écrire le cri. C'est murmurer l'espace entre deux cris ; hurler le silence entre deux gerbes, entre deux mots. Ecrire avec les ongles de la mort et le scalpel qui rouille dans son destin ; avec ce qui suinte le long des gouttières obstruées, le long des murs lézardés, le long des puits sans fond, le long des regards trop obscurs, le long. Ecrire pour vidanger la vessie des ténèbres, alors que le temps ne s'écoule plus, eaux stagnantes, que demeurent l'hiver dans l'été et l'automne dans le printemps. Que demeurent l'autre et l'instant – en eux-mêmes. Que demeurent l'un et l'autre dans l'antre de l'an. Dans l'étreinte des mots.

Ecrire pour simuler le simulacre, pour vérifier toute vérité qui se confond avec l'envers et l'ombre. Pour repousser les murs, qu'ils s'effondrent sous l'orage.

Ecrire dans la valse, le tourbillon qui équilibrent ton vertige. Porter ton front toujours vers l'avènement des formes. S'inscrire entre le rébus et l'oubli, entre les pages qui brûlent entre des mains. S'inscrire dans le mouvant et l'immobile.

Le livre détient le grain de sable qui contient l'univers. Oublié sur une étagère, il est cet étranger qui, sur le quai, attend le train de l'exode ou de la providence.

Nul ne peut voyager s'il n'a rêvé son rêve ; nul ne peut vivre s'il n'a vécu son livre.

La lumière efface les traces de l'ombre, ou les recrée. Et le chemin parcourt. Le chemin parcourt…

Nous sommes dans le livre autant qu'il est en nous. Cette chair de papier palpite entre nos doigts : abandon, reconnaissance, exutoire de nuit.

Les arbres sont les mots ; la forêt, une phrase ; le monde est un verbe. Sur chaque feuille s'inscrit un pas, la négation d'un pas : continuité de la rupture, rupture de la continuité. Tournons la page pour suivre la pensée qui s'effile…

Le livre se délivre dans nos yeux, se décharge du poids des mots avant que les mots ne s'emportent eux-mêmes. Si le temps change, c'est par les mots ; si le désir exulte, c'est par la chair des mots, par le regard qui les porte sur le sens, sur le corps du sens. Si l'enfant court et s'envole dans la pluie, c'est par l'humidité des mots. C'est par l'éclaircissement des mots que la nuit s'éveille au crépuscule et que le jour étreint le jour dans sa profondeur d'éclair. C'est par les mots que nous vivons la clarté des silences.

Nul n'est censé connaître l'exacte épaisseur d'un livre, encore moins sa profondeur. L'auteur lui-même ignore jusqu'à quelle roche il a creusé, ce qu'il a entraîné d'éboulements dans sa chute, ce qu'il a exhumé d'obscur de ses propres abîmes, d'obscur ou d'éclatant.

L'auteur lui-même relie ce qu'il écrit aux passages de l'existence, de la sienne, de celle de tous les Hommes.

Ouvrir un livre est un acte d'exemple et de courage. Les mots sont là pour incendier ou pour éteindre, pour fouetter ou pour calmer – pour aiguiser.

Le lecteur avance. Et le chemin parcourt.

Et la nuit dans la nuit s'éclaire de tant d'étoiles.

De tant d'étoiles.

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(*) Allusion au palimpseste.


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